dimanche, septembre 16, 2007

Atelier du 07/09/07

Proposition d'après Ardoise de Philippe Djian. Dans ce livre, Philippe Djian évoque les auteurs à l'égards desquels il se sent redevable. Il ne s'agit pas de solder un dette, mais de faire le point sur les influences les plus fortes qui l'ont menés sur le chemin de l'écriture. Il passe donc en revu une dizaine d'auteurs, de Kérouac à Carver et explore quelques aspects de sa rencontres littéraire avec eux.
"Jerome David Salinger
D'une certaine manière, je ne me souviens pas de ce qu'il y a avant L'Attrape-Coeurs. Je pense que quelques livres étaient déjà passés entre mes mains, mais je n'en ai plus le souvenir. Ma mémoire a tout effacé, comme si elle entendait lui faire place nette.
J'étais à Paris, au lycée Turgot, à cette époque et j'imagine que le ciel était gris et les murs d'un jaune pâle, assez tristes. Je devais être en seconde et avoir quinze ou seize ans. Ce n'était pas un lycée mixte. J'avais à peu près le même âge que Holden Caufield, le héros du livre. (...)"
Le proposition consistait à inviter chaque écrivant à faire le point sur sa propre ardoise, dans le champ littéraire ou autre. La contrainte formelle consistait à tenter d'écrire des phrases de plus en plus longues.

Texte de Christophe

Trop.

Il y en a trop.

Bien plus que beaucoup.

Excès pléthorique de la surrabondance.

Démesure d’une foule de personnages qui se pressent.

Galerie de démons en tous genres et de héraults de légende

Esprits conquérants et génies triomphants rayonnent en mon histoire.

Ils entrèrent dans ma vie au gré des programmes d’une scolarité laborieuse et chaotique.

Ils enflammèrent l’enfant impatient, prisonnier de la quotidienneté banale d’une histoire sans histoire.

Ce peuple d’encyclopédie nourrit les rêves gigantesques d’une faconde tourmentée, impérieuse et inconsciente

L’enfant courrait les cités, errait la forêt, bataillait ses semblables ; ses genoux écorchés hurlaient à l’avenir de remplir sa promesse.


lundi, août 27, 2007

Atelier du 22 juin 2007

Propositionde Gilles :
Terminer son texte par la phrase : Et le lendemain, elle était souriante


Marijo
Ils s’étaient téléphonés. Ils avaient discuté beaucoup. Ils n’avaient pas trop de temps
- Viens ce soir, j’vais à un atelier d’écriture entre copains. Tu verra c’est sympa. Ils sont fous mais pas méchants. Viens boire un verre.
Ils étaient venus tous les deux, juste pour boire un verre et ensuite, on verra.
- Il est neuf heures dix. On a une heure.
- Non mais vous savez, moi je en suis pas une littéraire et…

- Tu m'passerais la bouteille, s'il te plaît?
- Maintenant tais toi. Tu écris, et tu ne dis plus un mot.
Cinq minutes plus tard, ils essayaient tous d'écrire, qui à la main, qui sur son clavier.

- J'peux ouvrir un peu, vous allez me faire mourir?
- Qu’est ce que t’as, tu t’ennuis ?
- C’est lourd.
- Oh non,tu veux pas prendre un livre ou bien…
- C'est quoi ce petit bruit, ça me dérange. Tu peux pas arrêter s'il te plait?
- Elle est sympas ta copine. Elle ne veut pas aller faire un tour?
- Arrête tu m’fais chier avec tes histoires. On s’en fout.
- Comment ça on s’en fout ? Parle pour toi.

- Je suis là pour écrire moi. C’est tout ce que je demande.
- Beh c’est malin, tout ce que tu trouves à faire c’est de semer l’embrouille. Tu crois pas que t’as mieux à faire ?
- Mais t'es qui toi?

- C’est toujours comme ça. On est trop gentil...

- Bon ça suffit maintenant.
- Mais j’fais rien moi.
- On peut écrire là, s'te plaît? Arrête, tu m'déconcentres!
- Gilles on l’aime bien. T’es l’amie de Gilles. Mais là tu déconnes.

- Non mais j’dis rien.
- On va pas se battre quand même.
- T’es qui toi ?

- Plus que cinq minutes...
- Et j’ai rien pu écrire. C’est malin.

- J'peux fermer, j'vais mourir?
- Si c’est comme ça j’arrête ce putain d'atelier. On s'croirait en maternelle.
- Attention aux verres!

- Aille. Ca va pas ou quoi? T’en veux une toi aussi ?
- T’es contente, t’as tout fais foiré.

A dix heures, le groupe entier s’étripait jurant chacun de son côté. Plus jamais il ne pourrait s’entendre. Le dernier atelier d’écriture venait d’avoir lieu.
- On s'en va. J’te raccompagne. Tu m’as mis la honte. Décidément t’es pas possible.

Il l’avait raccompagnée chez elle sans un mot. Il n’était pas monté comme à son habitude. Il s’était tout juste dit au revoir du bout des lèvres.
Et le lendemain, elle était souriante.

dimanche, juin 10, 2007

Atelier du 8 Juin 2007

Proposition de Brigitte (détail à venir)

Gilles
-« Voter ??? Moi ? Jamais ! »
- « Mais pourquoi ? C’est ton devoir de citoyen… »
- «Mais voyons, enfin, c’est aussi lumineux qu’un isoloir ! »
- « Comment ça ? »
- « Mais ça crève les yeux ! Aussitôt franchi l’entrée du bureau de vote, il faut faire la queue comme à la cantine, sauf qu’à la cantine, tu vas tout manger ce que tu as choisi, alors que là, tu vas tout jeter, sauf un bulletin ; outre le fait que c’est un gâchis monstrueux, ils pourraient préparer pour chaque votant, un petit paquet de bulletins, tout propre, tout prêt… »
- « Mais quel rapport avec l’isoloir… ? »
- « J’y viens : tu passes dans l’isoloir, on t’oblige à fermer le rideau ; un rideau vaguement beigeasse, ou blanc pas net…Même dans la maison de la République, tu n’es pas chez toi, quoi…Chez toi, quand tu passes dans la douche à poil, t’es pas obligé de fermer la porte, ou de tirer le rideau ! Mais il y a plus grave : une fois que tu as fermé le rideau, qu’est-ce qui peut bien te donner envie de voter ? On y voit rien, vu qu’on a tiré le rideau… »
- « La lumière vient des plafonnier… »
- « admettons. T’as une lumière blafarde, une vague tablette, une poubelle dans laquelle finissent de se dessécher les derniers bulletins de vote des précédents électeurs. Et ô scandale, alors que tu vas accomplir un geste lourd de sens pour la république, pas un siège pour t’asseoir confortablement, pas une corbeille de fruits, pas même un téléviseur pour suivre Roland Garros. »
- « Pour toi voter, ça doit être un moment de détente, genre Club Med ? »
- « Un moment de réflexion dans de bonne conditions, oui ! Pourquoi pas un petit bouquet, un minibar, quelques revues. Si on ne donne pas aux gens l’envie d’aller voter, ‘faudra pas s’étonner s’il y a 30% d’abstention. »
- « Et cela te mène où, en définitive ? »
- « A voter blanc, c’est plus lumineux, et c’est meilleur pour mon teint ! »

Christophe et Marijo (qui ont tenté d'écrire à deux mains)
- T’as vu les résultats ?
- C’est Amélie Moresmo ?
- Naaaan, j’te parle pas du tennis, j’parle des élections. T’es au courant qu’on est en démocratie et que dans ce pays, c’est le peuple qui désigne les gens qui votent les lois ?
- Et les lois qui nous gouvernent ? Moi, j’me tâte, ch’uis pas sûre qu’ils ont besoin de moi pour se distribuer les influences et les luttes qui vont avec ? Moi, ch’uis pas sûre d’aller voter. Si j’étais un homme j’irais pas
- Une chance d’être nées femmes, ca nous exonère d’une bonne partie de la bêtise humaine.
- Encore si c’était un referendum sur le bien fondé des retraites accordées à tous ces guignols. En fait le moins on en change moins de retraites seront à verser avec nos impôts.
- J’suis pas sûre que c’est ca qui pèse le plus sur les finances publiques mais bon, comme la prime aux sortants à marché à fond d’après ce que j’ai entendu à la radio et qu’il y a un max de bedonnant qu’ont récupéré leur siège, je regrette pas d’être restée à la maison plutôt que de me livrer à cette farce.
- Il y a des femmes qui ont payé trop cher le droit de vote. En fait j’ai failli ne pas y aller. En votant j’ai payé ma dette… Si encore ils comptabilisaient les blancs… J’te parle pas de comptage ethnique. Nicolas s’y prépare mais c’est pas les bulletins qu’il veut compter.
- Mais attends j’te suis pas, on peut payer ses dettes comme ça ?
- Beh oui, quand tu votes, tu ne trahies pas ta grand-mère et blanc, tu lances un avertissement au système.
- Ma grand-mère, elle allait à la messe tous les dimanches et elle faisait son devoir conjugal en serrant les dents. Je suis sûre qu’elle aurait préférée l’abstinence et j’crois pas qu’elle se sentirait trahie par mon abstention. Quant à ceux qui se sont bagarrés pour instaurer la démocratie représentative, je sais pas ce qu’ils penseraient en voyant nos élus organiser leurs déconvenues conjugales pour faire la une de la presse people ! J’veux bien être gentille, mais quand même pas couillonne !
- Tu sais que la fille à Cécilia va rentrer dans le prochain loft ?
- J’savais pas mais ca m’étonne guère. Et j’te fiche un billet qu’on aura droit aux premiers émois du petit Louis quand on sera à mi mandat. Le plan de comm doit déjà être préparé. Ajoute à ca que les décisions importantes sont maintenant prises à Bruxelles et on commence à s’approcher du tableau exhaustif.
- On approche du « rocher », le pouvoir en plus et ça, ça fait peur… La l’état de Grace de Monaco, puis ce sera le petit Louis qui vomira dans les massifs.

mercredi, mai 16, 2007

Atelier à Hardelot du 12 Mai 2007

Proposition d'après Microfictions
"Grand-mères d'autrefois" de Régis Jauffret
Régis Jauffret illustre l'une des tâches de l'auteur : se glisser dans une multitudes de personnages et créer des univers différenciés. Microfictions se présente comme un recueil de 500 fictions, souvent drôles et flirtant fréquement avec quelques horreurs si constitutives de l'humanité. A partir d'une de ces Microfictions la proposition consiste à dépeindre une grand mère en vacances (ce qu'aucun des participants n'était!) sans propositions principales (figre styllistique utilisée par R. Jauffret).
"- Maison de famille, l'été.
Construite à ras de la plage. La baie paisible. Pas de yatchs mouillés à proximité. Pas de bateau à l'horizon. On dirait qu'une portion de mer a été arrachée au large pour être posée là. De rares familles étendues sous des parasols rouillés, troués d'avoir passé l'hivers dans un abris de jardin. Les enfants qui courent sur le bord et qu'il faut supplier avant qu'ils consentent à profiter du beau temps pour se baigner dans l'eau froide. Les bébés qui piaillent un peu, qui dorment, qu'on sort du berceau pour les promener dans ses bras. Le marchands de glaces et de beignets qui passe avec son panier pendu à son coup par une courroie usée.
"
Christophe
Dans un village champenois ravagé par deux guerres. Rapidement reconstruits avec les moyens disponibles. Gris. Triste. Les rues bordées de murs en crépis. Quelques portes cochères avec les enseignes de propriétaires récoltants. Le village est à flanc de colline. L’est glisse vers le lit boisé de la Marne. L’ouest s’envole vers une statue de la vierge à travers des rangées de vignes. Les trottoirs sont étroits. Impossible de se croiser sans qu’un passant descende dans le caniveau. Ma grand-mère sort de chez la coiffeuse. Petite taille. Robe plissée. Cheveux courts. Sa mise en plis aux reflets mauves. Le clocher sonne 15 heures. Le Familistère, la boulangerie, le boucher et la Coop. Echange de sourires. Acquiescements. Signes de la main. Elle passe devant l’Eglise. De l’autre côté, la grille du château Montebello. Les caves Rolland Billecart. La maison Philipponat. Puis elle s’engage dans une large impasse. A gauche une pente douce pour que les camions montent les chargements de raisin vers le pressoir lors des vendanges. A droite, une maison louée à des ouvriers polonais. Au fond, la façade d’une maison à étages.
Marijo
90 ans à Noël, neuvième de la fratrie, dernière arrivée, dernière partie, Nati la mamie. Ravie, toujours en vie au haut de sa tour HLM. Un sourire réjoui. Mille choses à raconter, souvenirs d’une vie d’expatriée laborieuse et si exotique, trois couplets en espagnol et le reste en français.Dans la cuisine, un piaf solitaire compagnon de solitude. Son hobby : la gourmandise, préparer, déguster, partager avec qui la visite.
Au quinzième ni poussière, ni vitre à laver ni aide ménagère. Sa vie à servir et finir pas se faire servir despues ? Quand même...
Au quinzième le silence et les chants du pays.
Au quinzième pas de rideau, un jardin suspendu dopé à la lumière du ciel.
Au quinzième, la petite bonne venue de Saragos discute avec les nuages.
Hélène
Une grand mère en vacances.
Une location d’été pour une famille parisienne dans une région de châteaux et de propriétés de bridgeurs.
Des après-midis concentrés : autour de chaque table, trois joueurs qui lèvent le menton pour scruter les cartes jetées et qui le replongent dans leur écharpe pour préparer la réplique.
Les morts debout, accrochés au dossier de leur partenaire, et parfois à leur cane.
Une femme en tablier blanc, à la main discrète pour changer les verres de rafraîchissement.
L’âge moyen exige une lutte contre la déshydratation, l’insolation et l’humidité sous les arbres.
Une des participantes les plus fringantes, ma grand mère, un rouleau de cheveux teints sur la nuque et les lèvres perpétuellement en mouvement.
Ses trois préoccupations : vérifier qu’à la table voisine, son père ne manque de rien, que dans la bibliothèque, « son petit Jo » de mari ne s’impatiente pas , et GAGNER.
Chaque après-midi semble un combat : savoir faire équipe et gagner.
Depuis des années, ces couples tournent autour des tables ; une certaine excitation restera perceptible pour l’enfant que je suis, lorsqu’au dîner familial les coups seront commentés.

mardi, mai 08, 2007

Atelier du 4 Mai 2007

Proposition d'après "Miette" de Pierre Bergounioux.
"L'escalier de la cave, rongé par l'humidité,ayant commencé à donner des signes de faiblesse, il reçut l'appui de forts burins coniques pareillement engagé dans la maçonnerie. De sorte que le jour où une marche céda sous mon poids, l'un d'entre eux, qui dépassait d'une bonne trentaine de centimètre le limon, me froissa les côtes en long pour finir sa course dans le creux de l'aisselle. Je tenais à deux mains je ne sais quoi de fragile et de lourd que je n'entendais pas lâcher. Ca se serait mal terminé si mes pieds n'avaient touché le sol au moment où le burin arrivait au fond de l'espèce de cul-de-sac que forme la jonction du tronc avec le bras."
Dans le style ciselé de P. Bergounioux, qui utlise un vocabulaire précis et une manière ciselée, tenter de décrire avec le plus de précision possible une scène aussi pointue et improbable (nous nous entendrons pour proposer la même que celle de l'extrait).

Christophe
Dans les maisons préfabriquées pas chères des années 80, le peu qu’est pas en placo est livré en plastique. Sauf les fondamentaux de l’édifice qui sont coulés en béton pour que tout le reste puisse s’y accroché pendant la durée de la garantie décennale. Signez là avant qu’on sabre le champagne. Le savoir faire de nos ouvriers et l’ingéniosité de nos équipes d’architectes. Dix ans de garantie parce que c’est la loi, mais pour des décennies de tranquillité mon cher Monsieur. La qualité, ça ne trompe jamais.
On a sabré les cacahuètes et sifflé nos flûtes en se congratulant. Tout le monde était un peu pressé mais j’ai quand même parlé de la tâche d’humidité au sous sol. On s’est dit que c’était normal sur une fin de chantier, qu’on s’était un peu bousculé pour tenir les délais car on savait bien que tout le monde était impatient mais que c’était rien du tout, qu’en deux jours il n’y paraitrait plus. C’est du solide ça M’sieur Dame et si vous voulez avant qu’je parte on peut aller jeter un œil parce que je suis tranquille, y a pas de problèmes. Dans l’escalier, on a remarqué la qualité des finitions et celle des matériaux. On a donné des coups de talons sur les marches. On allait pouvoir dormir sur nos deux oreilles et surtout pas nous inquiéter.
Gilles
J’ai, à l’évidence, trop bu de ce délicieux Bourgueil accompagnant les rognons dont ce soir je me suis gavé.
Sec de mots, assoiffé de verbes, en mal d’adjectifs et d’adverbes, s’impose à moi comme une nécessité catégorique, si je veux continuer ce soir mon récit, la descente dans le noir dictionnaire coincé, là bas, entre de vieux numéros du « petit écho de la mode « et les œuvres complètes de Victor Hugo.
Après avoir allumé la pâle ampoule au-dessus de la bibliothèque, j’entre avec précaution dans le précieux dictionnaire dont je connais les chausse-trappes, les degrés incertains, la planche glissante des synonymes, toujours prêts à faire chuter le lettré le mieux averti.
Je tombe sur la lettre « M » ; L’œil bizarrement attiré par le nom d’un ancien dirigeant du parti communiste français, je ne vois pas que le nom qui suit, le mot « marche » est vermoulu et cède sous mon pas ; feuilletant à toute vitesse les pages qui défilent sous mes yeux, je me raccroche dans ma chute à la lettre B, comme burin, qui me fait en passant une belle estafilade sur le poignet et remonte en saignant mon bras jusqu’à l’aisselle. Provisoirement bloqué entre « burin » et « buse », mon pied avance à tâtons jusqu’à la lettre suivante, le C, comme « cave ». Pour inconfortable que soit la pose, mon pied s’y arrime quelques secondes. Me croyant tiré d’affaires, je reprends de l’assurance, mais la cave se rebiffe, et je reprends ma chute effrénée, déchirant ma chemise sur le mot « cran d’arrêt », me cognant la tête sur le mot « cruche », m’éclatant le cuir chevelu sur le mot « cervelle ». Un autre mot met un point final à ma chute : le mot « con ».
Marijo
En guise de patère pour sa veste de jardin, mon père avait glissé un burin entre deux moellons apparents de l’escalier de la cave. A une de mes expéditions souterraines, la septième marche, fatiguée d’être impitoyablement piétinée céda férocement avec un cri de fracas justicier. Jusque là menaçant, la présence d’esprit et l’adresse du porte-manteau pour me retenir d’un doigt ferme glissé sous mon bras le transforma en ange gardien. Empêché dans ma culbute, j’eu l’immédiate certitude que je devais ma vie sauve à cette ferraille jusque là dépréciée.
Hélène
Merci Hitler,
Sans lui, pas de moi,
Et je ne suis pas seule dans ce cas.
Que de rencontres provoquées par sa volonté,
sa nécessité pressante d’occuper Paris.
Mes grands parents paternels ont fui le XVI ème pour Angers, ville que traversaient mes grands parents maternels en provenance de la rive droite également.
Dans ce château d’amis communs, il a dit de ne pas l’attendre, que l’armée anglaise était loin.
Elle lui a confié sa chaîne de baptême, puis a refusé trois demandes en mariage pour lui.
Trent ans après, elle ne se lassait pas de le lui rappeler, il souriait d’un air gêné de la faire souffrir par ses retours tardifs.
Et moi, je sais : depuis l’enfance de mon père, une blondinette viennoise lui tient au cœur, il ne s’en cache pas, mais Hitler a bousculé des vies.
Le père autrichien était nazi, ces français combattaient le nazisme.
La brune du château angevin est devenue la fiancée, puis ma mère,
mais Hitler ne nous a pas rendus heureux.

vendredi, mai 04, 2007

Atelier du 6 avril 2007

Proposition : A partir du livre d'Eric-Emmanuel Schmitt "La part de l'autre" écrire un texte commençant par "Et si...."

Thierry :
Et si j'avais pu grandir dans un espace d'amour parental sécurisé, aurais-je été homosexuel ?.La réponse est "Oui".
Cette hypothèse de vérité sur l'amour sécurisé m'a été apportée comme le Saint Graal par mon psy, un jour d'Octobre 2001. Elle a changé ma vie. De la fiction je suis passé à la réalité. Enfin liberé, enfin dans ma vraie vie.
Cette profonde réflexion m'amène à penser que la vérité est bien plus forte qu'une simple hypothèse, mais que parfois la vérité naît aussi d'une hypothèse. De toutes les façons on ne change pas le cours des choses, sauf si une hypothèse vient boulverser une vérité....ou réciproquement !.

Marijo
Si seulement ce jeune Adolphe avait été reçu à son concours ! Comme tant d’autres étudiants, il en aurait sans doute était pleinement fière et satisfait. Son ambition : devenir le maître de la peinture contemporaine. Difficile à croire qu’il aurait pu susciter la jalousie de Staline. La chose artistique aurait sans doute habité son esprit tout au long de sa vie. Il se serait vu installé quelque part sur le flan d’une montagne à l’ombre de la forêt bavaroise. D’abord exposé dans les salons amateurs, son acharnement l’aurait lancé à la quête de la reconnaissance de ses paires. Son opiniâtreté l’aurait amené à chercher un moyen de se faire reconnaître plus que de vivre de son art. Chef d’atelier. Il aurait mis toute son énergie à faire connaître la valeur de ses élèves. Il aurait établi des règles strictes d’ordre et de discipline. Interdire toutes inspirations issues d’une culture autre que germaine…

mardi, mars 27, 2007

Atelier du 23 Mars 2007

Proposition de Thierry
Décrire une journée de sa vie ou de travail en employant le plus possible de noms propres poétiques.

Extrait du roman de Stéphane Fière "La promesse de Shangaï"
"Il a proposé d'aller manger chez le Roi de la Nouille.....L'Orient Paris avec ses tours de 37 étages.....Celui où se trouve le salon de thé traditionnel Harmonie Universelle....J'avais l'intention de l'attendre devant le karaoké Le Monde de la Fête....Nous avions décider d'acheter une couette neuve en duvet de canard dans le délicieux magasin A la Bonne Literie....Avec son salaire de quatre cents yuans par mois pour les quatre jours par semaine dans le magasin Génération 2000....Ellles allaeint manger des raviolis au restaurant Aux Six Viandes..."

Thierry
"Les convenances parfumées, tel était l'endroit où je travaille. J'en suis le responsable. Vêtu d'une blouse synthétiquement blanche, j'occupe un petit emplacement d'où je peux surveiller les allées et venus de mes hôtes. Souffle du Printemps m'aide à m'accommoder des odeurs laissées parfois par un garde-manger en col blanc ou une Marylin trop platine. Pour me remercier de ma grattitude, mes invités enfin soulagés me laissent parfois quelques mitrailles usagées. Outre ma surveillance, je mets un point d'honneur à entretenir au mieux l'endroit, afin qu'il laisse un furtif souvenir de soulagement apaisant. Je veille particulièrement à toujours approvisionner en feuilles de caresses parfumées les devidoirs. Rien n'exaspère plus mes clients que de se retrouver nus en manque de carresses. Mon polichinelle à poils drus m'aide également à renrde blanc ce qui l'espace d'un bref instant a pu virer au marron glacé!. La journée s'écoule ainsi, toujours de la même façon, rythmée par l'arrivée dans la station des rames vertes et blanches deversant la horde des travailleurs. De 9h00 à 18h00, du lundi au vendredi, j'ouvre les portes de mon paradis temporel à celles et ceux désirant trouver sur leur chemin un havre de soulagement."

Hélène
"Au matin, à Hardelot plage, l’eau est hard pour le baigneur qui reste pelotonné dans son peignoir pour franchir l’estran.
Ses pieds se courbent sur les ridules sableuses et encoquillées des bâches, là où les crevettes en pincent pour les crabes qui ne dépassent jamais leur taille.
A midi, la villa Les Beaux Jours accueille sur son perron les rescapés du bain qui choisissent une marche au soleil ou au vent pour se sécher les cheveux.
Les richesses régionales ramenées du Marché Gourmand leur font croire aux abeilles du Pas de Calais, au roquefort de Picardie, à l’andouillette d’Ambleteuse, … . L’eau creuse, tout est bon.
L’après-midi verra les marcheurs entrer dans le bois du Pré Catelan pour suivre la route des juifs qui est une dalle de béton sur les dunes et les oyats. Le sable y réverbère la lumière et la chaleur emmagasinées. Certains choisissent pour leur sieste de rester proches de la villa DO MI SI LA DO RE qui distille avec allégresse son programme FIP .
La soirée se veut plus intellectuelle, avec apéro et papotage au Bar de l’Océan, en surveillant du coin de l’œil le rayon vert. La partie de scrabble arrive après le dîner, à l’étage noble de la villa, celui d’où l’on peut surveiller l’ancienne place des tennis. Elle vient d’être rebaptisée Louis Marie Cordonnier en reconnaissance des mérites de cet architecte qui sut poser les villas en fer à cheval pour éviter l’obstruction de la vue sur la mer.
Il est arrivé à Hardelot, Pas de Calais, que les lampes s’éteignent mais que les coups de soleil rougeoient".


Marijo
Ce matin, rendez-vous à une sortie du RER en banlieue avec un spécialiste de l'habitât urbain. A la recherche de notre nid d'amour, j'étais tombé sur une annonce pour le moins prometteuse. "A vendre charmant petit duplexe 110 m2, quartier résidentiel et calme. Bâtiment de caractère, fin 19 eme. Lumière zénithale, poutres apparentes, sol en marbre d'Etiopie, cuisine américaine, possibilité atelier, cour ombragée, 15 minutes de Paris Gros potentiel"
Le RER a pris près de vingt minutes à s'enfoncer dans une banlieue cafardeuse. Là m'attendais l'agent immobilier pour les dix minutes de route à rajouter.
Quelle surprise! Le moteur de sa BM s'arrête en fond d'impasse derrière le bâtiment désafecté de la laverie municipale. Aucun signe de vie si ce n'est le concert d'aboiements des chiens réveillés par le claquement des portières de voiture. Une porte métallique et rouillée sur une façade aveugle nous permet de pénétrer dans un vestibule où flottait une odeur d'humidité sans doute venant des égouts. La seconde porte franchie, nous nous trouvons dans une salle plutôt petite et très basse de plafond. Le sol dont on imagine avec peine qu'il fut blanc est couvert de fiente de pigeon et de moisissures. Quelques dalles du faux plafond sont manquantes et mon regard tombe sur la taule ondulée de la toiture posée à même une charpente métallique noire de rouille. Deux minuscules fenêtres ouvrent sur une cour fermée de hauts murs de parpaings. Derrière une porte de placard entrebâillée, je découvre une plaque électrique posée sur un frigidaire table qui jouxte un évier crasseux dont la robinetterie manque. Au centre une trémie d'escalier pour accéder au sous sol. L'escalier est branlant, la hauteur sous plafond est à peine d'un mètre quatre vingt dix et le sol est en terre humide. « Vous voyez, là, vos pouvez ouvrir la plafond à la hauteur du chien assis du séjour et avoir une belle lumière directe. Un atelier n'a pas besoin de lumière du soleil. Et pourquoi croyez-vous que les ateliers d'artistes sont toujours exposés plein Nord ? »

samedi, février 24, 2007

Atelier du 23 février 2007




Proposition : A partir des illustrations de Maé ( 12 planches ), imaginer une histoire

Thierry
Et après?
Ted qui voulait connaitre son avenir, décida d'aller dans la forêt de Goulko, là où se trouvait la qerrure magique. Une longue marche à travers la forêt pétrifiée, lui permit d'atteindre enfin la porte de bois clair et son immense serrure. Curieux et prudent, il colla son oeil sur l'ouverture. Sa première vision lui renvoya une lumière blanchâtre et des formes sans arrondi. L'ombre d'une femme "surcoiffée" traversa devant lui et laissa place à un paysage apocalyptique. Un lit et une voiture suspendus dans des arbres de couleur cendre et sans feuilles. Un immense chêne, ou ce qu'il en restait, s'avança vers Ted et se présenta comme le seigneur de Goulko.
- Bonjour mon garçon, que puis-je pour toi ?
- Bonjour Monsieur, répondit timidement Ted, je voudrais voir mon avenir, le beau et le moche !
Le seigneur répondit :
- Le beau tu ne le verras pas, les humains ne le comprenent pas, ils l'ont détruit, il n'existe plus!
L'enfant apeuré lui demanda de voir le moche.
L'arbre écarta ses branches. Ted vit sa propre personne sauter d'arbres en arbres jusqu'à se rapprocher d'une petite fille à grosse tête assise au bout d'une branche.
Avant qu'il n'ait pu l'atteindre, la gamine tomba et disparu. Ted se mit à hurler, crier, gesticuler.
Lui qui errait depuis si longtemps dans cette forêt de l'apocalypse, rêvait de rencontrer une forme humaine.
Il demanda au vieux chêne :
- Toi qui est le seigneur de la forêt, pourquoi as-tu laissé tomber cette petite fille ?
Le chêne dévêtu lui répondit :
- Cette petite fille était si moche, qu'en tant qu'humain tu aurais été incapable d'amener à toi, sa beauté interieure !.

Marijo
Marin du ciel, démon de l'air
Bateau par-dessus branches,
Lit par-dessus ciel
Maison de vent et tout fout l'camp
Forêt de papier et souffle blanc
Tempête du désir, délire du naufragé,
Folles amours, cahot de la destinée
Marée basse, lit au sommet.
Tout ce qui est en bas est en haut,
Quitter le monde où tout ce qui est en bas demeure.

dimanche, janvier 28, 2007

Atelier du 26 janvier 2007

Thierry
45 ans en paraissant 60, mal rasé, le cheveu hirsute, Vladich était professeur en histoire de l’art à Sarajevo. Depuis 5 ans il survivait à Paris à deux pas de la tour Eiffel. Au moment ou son pays sombrait dans un gigantesque trou noir, il s’était réfugié dans la ville des lumières de la vieille Europe. Un chemin de croix de 28 jours l’avait amené au pont de l’Alma, coincé entre un Zouave et le mémorial d’une princesse mal aimée. De sa terrasse en bord de Seine, il fumait de vieux mégots usagés en regardant l’avenir derrière lui. Il pensait qu’il pourrait encore tenir quelques jours avant de déménager dans un coin plus abrité. Bien qu’il n’aima pas dormir au-dessus de l’eau à cause de l’humidité et de la peur de tomber, cette année encore les poutrelles du pont seraient son refuge hivernal. Il s’habituait à cet endroit car il était tranquille. Les habitants du quartier ne venaient pas l’ennuyer, beaucoup d’appartements avaient les volts fermés. Seuls de rares africains ou Roumains avaient essayé de se joindre à lui, mais ils ne supportaient pas le bruit des voitures. Vladich n’y prêtait plus attention depuis bien longtemps. Vladich n’était sensible qu’u bruit des obus, la nuit dans ses rêves.
Un soir d’ivresse et de fumerie désespérée, il vit apparaître des chevaliers emmitouflés et bardés de gilets orange fluorescent. Il n’entendit que deux mots : Don Quichotte !


Marijo
Sous les yeux blasés des gratte-ciel frigorifiés, la marée humaine a envahie la cinquième avenue, mardi 26 décembre, premier jour des soldes. C'est la nuit et il fait clair comme en plein jour. Batailles des décors lumineux. Le couple avance. Comme pris dans une chenille de foire, son allure et ses mouvements ne sont plus sous contrôle, Il marche sur 100 mètres, est ralenti puis arrêté le temps que le feu passe au rouge. La course reprend jusqu'au bloc suivant. La femme se cramponne inquiète. Malgré toutes les occasions de se perdre, main dans la main ils progressent. Ils sont deux gouttes d'eau solidement liées dans le flux de million de gouttes d'eau et ils trottinent. Le torrent les porte sur la droite du trottoir, habitudes de circulation obligent. Spontanément, ils ont choisi d'emprunter le trottoir de gauche, ça coule mieux. A droite, les vitrines aguicheuses, autant d'écluses qui ralentissent le flot désorganisent le cours. La foule vive se réjouit des affaires à faire. Odeurs de pop corn et brinzel chauds, cris stridents des sirènes prioritaires, Quelques pères Noël désœuvrés ont gardé leur costume un peu flétri, difficile renoncement du passage au 26 décembre pour qui n'a que 24 heures de boulot par an! L'objectif : atteindre le MOMA avant la fermeture et pourtant impossible d'accélérer, le vitesse est imposée.

Atelier du 15/12/06

Proposition : A partir de certaines photographies de l'exposition "Un Autre regard", mettre des légende sur chacune des 10 photos proposées.










Thierry : "Mochebourg" station spatiale













Thierry : Souvenir d'Atlanta













Thierry : L'enfer ou le paradis ?












Thierry : Babel revisité











Thierry : La fin du trou noir











Thierry : Versailles 2036







Thierry : Messages des Terriens







Thierry : Mars Attack !










Thierry : Tarentule











Thierry : Big Brother vous regarde !

dimanche, novembre 19, 2006

Atelier du 17 novembre 2006

" Antonio Lobo Antunes in "Mémoire d'éléphant".
"…quand Charlotte Brontë le rappela à la réalité présente de cette matinée hospitalière en secouant des deux mains les revers de sa veste en même temps qu’elle entremêlait les gros fils de laine libertaire de la Marseillaise avec le crochet populaire du fado Alexandrino en maniant les aiguilles agiles d’un contralto inattendu. Le fond de sa bouche arrondi comme un anneau de serviette exhibait la larme tremblante de sa luette se balançant tel un pendule au rythme de ses beuglements, ses paupières s’abattaient sur ses pupilles perspicaces à la manière de rideaux de théâtre qui seraient descendus par erreur au milieu d’un Brecht savamment ironique."
A la manière de Lobo Antunes qui ne recule devant aucune comparaison, aucune image, aucune métaphore filée...décrire le magasin Shopi de Sainte Menehould, souvent imaginé si jamais vu par les participants de l'atelier.

Texte de Thierry :
Sur une devanture jaune tournesol, les lettres SHOPI couleur bleu azur se détachaient distinctement. J’avais enfin trouvé le temple de la consommation de la région. Bien sûr ce n’était pas un centre commercial mais SHOPI promettait sur ses affiches « qu’ici c’était mieux qu’à côté ».
Quel plaisir de pouvoir stationner sans se préoccuper des parcmètres. Enfin la liberté de stationner, qui l’aurait cru ?... Passé les portes coulissantes du magasin, je remarquais l’incroyable silence qui y régnait. Ici point d’annonce racoleuse dans les hauts parleurs ventant les bienfaits des crèmes amincissantes pour femmes ménopausées. Rien que du calme. Pas de vendeur dans les allées. Rien que du vide. Pas de rayon débordant d’articles superflus. Rien que le nécessaire. On était loin de Paris loin de la société sur consommatrice. Je trouvais enfin les boîtes de pâté. Quel bonheur, pâté de foie ou pâté de campagne. Etiquette bleue ou étiquette jaune. 2,50€ ou 3,15€. Mon choix se portait sur le pâté de campagne Ardennais. Boîte bleue avec une tête de sanglier sur fond de paysage vallonné. Je cherchais l’espace boulangerie mais en vain. Ici rien que du pain de mie, 2 choix, 2 marques, 2 prix, 2 couleurs. Pareil pour le vin. Ici tout fonctionnait par deux, un vrai soulagement pour les victimes de Corneille !
Je me dirigeais vers la caisse. Quel plaisir de ne pas faire la queue comme chez Carrefour le vendredi soir. Ici la caissière attitrée portait une blouse bleu pâle et vous accueillait avec un sourire trop rouge et une teinture de cheveux à faire pâlir J.Dessange. Ici au SHOPI de Ste Ménéhould, Roseline prenait le temps de vérifier le prix des étiquettes portés sur les articles avec ceux enregistrés dans la machine électronique. C’était formidable, pas de gâchis, 1 seul sac plastique suffisait pour emballer mes articles.
Pas de paiement par carte mais deux vignettes points fidélité à conserver. Le retour vers de vraies valeurs !
S’il y avait bien un endroit à indiquer dans le guide du Routard ‘ Champagne-Ardenne 2006-2007 » c’était bien celui-ci. Ca pourrait s’intituler « Avec SHOPI Ste Ménéhould retrouvez le goût de la vie » !.


Texte de Clara
A 8h du soir, les rues sont désertes à Sainte Menehould. Dès 19h, les volets ont été rabattus sur les intimités encaustiquées. A travers les lattes des persiennes filtre la lueur intermittente des téléviseurs. Sur la place, les platanes au teint blafard boivent une flaque de lumière parcimonieuse. C’est le cœur commerçant de la ville qui s’épuise dans le grésillement de ses néons.. Derrière la porte du Shopi se déhanchent des piles de cageots vides et serpente une chenille de caddies au repos. Un chien trottine entre les arbres et déclenche des aboiements sortis d’on ne sait où, et ce sont des ordres en cascade qui giclent soudain pour retomber dans le silence indifférent.
Mais qu’on ne s’y trompe pas, Sainte Menehould n’est qu’endormie. Demain le Shopi fourmillera d’activité. A la première heure, le patron, Monsieur Dubout, béret vissé sur le front, fera teinter son trousseau de clés sur la plaque de laiton de la serrure, puis, la main sur le tableau de commandes, il illuminera le palais des merveilles, révélera les trésors de la caverne d’Ali Baba. Surgiront de l’ombre des linéaires d’emballages brillants, les transparences rosées des goulots alignés, les présentoirs de sachets Villemorin que le maître des lieux ferai tourner machinalement pour le plaisir d’entendre la pluie joyeuse des graines. Il dérouillera sa caisse grippée, remplacera voluptueusement le rouleau taché d’encre violette, cassera sur le bord du tiroir les rouleaux raides de pièces et écoutera dégringoler la ferraille. C’est à cet instant qu’entrera Madame Morvan dans un chuintement de chaussons traînés. Levée depuis 5 h ce matin, elle a attendu le grincement de la porte du Shopi, signal de départ de sa journée. Elle n’y prendra qu’un paquet de sel et un oignon et fera semblant d’avoir oublié le reste pour revenir une fois, peut-être deux, dans la journée.


Texte de Gilles
La porte automatique du Shoppi baille et soupire périodiquement pour laisser passer le chaland, en regardant, en face, le Monument aux Morts, qui ne cessent d’expirer depuis la Der des Der…
Profitant de l’entrée d’une ménagère emperlousée qui me jette un regard glacial comme si je lui avais collé au cul, je me glisse dans le magasin envahi jusqu’au plafond de tonnes de pâtes et autres denrées, et de dizaine de litres de cette eau fadasse et insipide : l’eau minérale de Ste Ménéhould, m’avait-on bavé aux oreilles avec délectation. « Allez donc au Shoppi, c’est là qu’elle est la moins chère », avait-on assuré.
Bravement, je m’avance vers le rayon des eaux minérales, bien décidé à en découdre avec la pellicule glacée de plastique qui enveloppe, compresse, comprime, embrasse, étreint de sa poigne transparente au moins une douzaine de bouteilles à la fois. C’est qu’il n’est pas dans mes intentions d’acheter plusieurs bouteilles de cette flotte ; je n’en prendrai qu’une, préférant de beaucoup la bière de Ste Ménéhould, réputée pour ses vertus digestives.
Au prix d’un ongle cassé net, mort au champ d’honneur, je parviens à faire un trou dans la carapace.
Un deuxième ongle est sacrifié : la gangue n’est pas morte. En y enfonçant mes doigts en formes de crochets, je réussis à accentuer la béance. Mais le film de plastique est un loup pour l’homme : sitôt tiré, il se rétracte, fait la bête, fait le bête, fait celui qui ne comprend pas.
Victoire ! L’ennemi a cédé dans un long cri de bête blessée, sur le point d’agoniser. L’ennui, c’est que le combat se termine par la dégringolade, l’éclatement sournois de l’ensemble de la pile de bouteilles, liguées contre moi.
Comme des épaves au milieu de l’océan, mes chaussures naviguent, mes pieds barbotent. Je m’enfuis, rincé. Avec une bouteille de bière de Ste Ménéhould sous le bras.

Texte de Christophe
Au cours de la belle saison, celle qui s'étend de mai à septembre,la porte du Shopi de Sainte-menehould reste ouverte de l'aube au crépuscule. Le patron descend de son appartement du premier étage par l'escalier intérieur. Il tire la porte du Shopi dès les premières lueurs du jour, avant de lever le rideau de sécurité destiné à protéger contre l'intrusion inamicale de visiteurs nocturnes, tandis que la patronne la referme à la nuit tombée, après avoir rabaissé la tranquille garantie d'intégrité de la supérette. Au total, le Shopi de Sainte-menehould reçoit les habitants pendant plus de quatorze heures,, avec des pointes à seize ou dix-sept les veilles de fêtes et pendant les vendanges. Il voit défiler des espiègles matinaux, chipeurs de friandises en route pour l'école, des ménagères à la recherche d'ingrédients manquants dans des placards domestiques pourtant bondés, des retraités dont les bavardages ont cessé de refaire le monde pour ne plus s'occuper que de maladies sans fins et de pharmacopées sans effets, des voyageurs certains de s'être égaré en quête de boissons rafraîchissantes et quelques bricoleurs étonnés de leur surprise lorsqu'ils mettent la main sur le paquet de vis introuvables ou de douilles inaccoutumées, cachés derrières les produits de premier rang. Toute la journée, l'exeption est la règle au Shopi de Sainte-menehould où le labyrinthe des rayons et des gondoles recèlent à la fois du nécessaire et de l'inespéré.


Texte de marijo
Comme un tome d' encyclopédie sans âge et poussiéreux qu’on aurait oublié depuis que le petit avait fait carrière, la boutique est rangée entre le bureau de Poste et l'étude du notaire. La devanture usée comme la blouse de travail la veille d’une retraite, semble tenir grâce aux multiples couches de couleurs passées. Monsieur Bertrand avait peint son « Epicerie Principale" en brun ventre de puce. La boue marque moins les bas de pantalons couleur terre lui disait sa mère en choisissant l’étoffe de son prochain costume qu’elle confirait au tailleur. Sa femme devenue veuve, l'avait préféré rose, un rêve de jeune fille. A sa mort que les clients auraient souhaiter plus tardive s’il y en eu, le gérant de la Coop l'avait faite orange exotique heurtant la grisaille de l’Avenue Principale à la manière du jeune rebelle convaincu de sa naïve intuition. Puis monsieur Goulet Turpin la décida blanche devenue grise à mesure que sa tignasses blanchissait. A sa mort Felix Potin la couvrit de rouge et jaune couleur enseigne de la nouvelle station service à l’entrée du bourg. Trop Shell ou peut être trop espagnol, à sa réouverture en Shopi la modernité des années soixante imposa une combinaison de bleu, jaune rouge, positionnement étudié depuis les bureaux parisien où les effets de mode sont aussi absolus qu’éphémères. La vitrine déborde de confiseries multicolores, comme pour promettre l’achalandage à découvrir, appâts illusoires vers les petits enfants si désirés et si rares des derniers habitants de la bourgade, les enfants détallés tout juste majeurs pour n'y revenir qu'aux vacances avec leur progéniture essouchée que seules les fraises tagada familières savaient rassurer.

dimanche, novembre 12, 2006

Atelier du 03 novembre 2006

"Les délices de l'énumération. Rien au monde n'est assez unique pour ne pas pouvoir entrer dans une liste" Georges Perrec
On trouve tout dans les listes, la fantaisie qui naît de l'accumulation d'éléments imaginaires ou réels. Exercice formel qui permet de faire naître du poétique d'une simple juxtaposition. C'est un jeu qui insufle de la poésie dans le regard qu'on porte aux choses réelles.


Marie vierge mère de jésus
Marie thérèse ma mère
Marie madeleine amie de jésus
Marie Stuart reine, fut exécutée
Marie antoinette reine, fut exécutée
Marie Trintignant actrice, fut assassinée
Marie paule une copine d’école
Marie jo une copine
Marie de France reine de France, française
Marie Leszcynska reine de France, polonaise
Marie louise impératrice
Marie jeanne à consommer avec modération
Marie brizzard « cul sec »
Marie galante, île des Antilles
Marie salope mène en bateau et la
Marie couche toi là…

Pour l’Amour
- Aah (au début)...................................... Ah (à la fin)
- Abandonnée (dès le début) ................ Abandonnée (vers la fin)
- Accueil (chaleureux) ........................... Accueil (glacial)
- Adoration (à éviter) ............................ Adoration (terminé)
- Aérien (si léger) ................................... Aérien (retour sur terre)
- Affinité (si possible) ............................ Affinité (plus possible)
- Agacement (ça arrive) ....................... Agacement (permanent)
- Ailes (on peut les sentir pousser) ..... Ailes (on ne sent plus rien)
- Aléas ( on peut pas les éviter) .......... Aléas ( on peut pas les éviter)
- Amitié (si loin) .................................... Amitié (peut être ?)
- Angoisse (jamais) ............................... Angoisse (toujours)
- Appâts (les miens) ............................. Appâts (les siens)
- Ardent (pour moi) ............................. Ardent (pour elle)
- Attente (heureuse) ........................... Attente (frustrante)
- Autre (quel autre ?) ......................... Autre (une autre)
- Aveux (inutiles) ................................ Aveux (lui)
- Azimut (tout) .....................................Azimut (tout)
Brigitte

An Apple a day keeps the doctor away » répéta mon Boss Hugo, un Monsieur Propre et toujours de bon conseil. C’est Bon Marché au champ mais plus cher qu’aux Galerie. Lafayette lui, savait qu’en Société Généralement on attrapait Lajaunie Cachou des oscillo coccinum animaux de l’haut asis, qui ne mangeait jamais de pomme. C’est un Mal Beau Rots inévitable, Papy Brossard et Hugo, mon Boss sont toujours du même Avis. Papy qui est Picard et toujours Habitat avec Mamy Nova depuis le temps et il Levis hyper bien (ce doit être les pommes) Elle disait tout le temps « Go ! Voyage before the last minute » Eux ont Pall Mal bougé, ils ont besoin d’Air. France ou autres compagnie, ils ne tiennent pas en place. Etam, Tam Tam comme des Routards, ils ont rencontré Paul Smith à London et aussi Larousse, qui se faisait appeler Pink Lady avec ses belles pommes parce qu’ils habitaient Soho. Tout autour du Monde, ils ont vécu ça comme une Libération, les deux faisaient Lapeyre pas comme Af Leloup et Hippopotam, us were not Happy Friends mais je ne sais pas s’ils mangeaient des pommes. C’est peut être cela ?
Bref, ils ont tout vu, tout lu ça avait l’air AT Pas souvent. Mais moi, je n’ai jamais été mieux que dans Magrange près de Longchamps et de la Fontaine Claire.
Mes amis n’étaient autres qu’un géant vert et un petit ours brun.
Maé

samedi, octobre 21, 2006

Atelier du 19 octobre 2006

Thierry
A voile ou à vapeur, c'est une question de bite pour les bateaux et les hommes !

Sur les buttes un voile est tombé,
Brume d'automne,
Feuilles qui tombent sur le pavé,
Couleurs polychromes.

Islamique ou marié,
Ce sont les femmes qui le porte,
Imam ou curé,
Eux, ont le droit de vote !

Passé le mur du son, le voile noir atteind mon cerveau.
Je laisse mon corps sans protection jouer de mon sang et de mes boyaux.

Un voile sur ta voix comme une écharpe de soie,
Un voile sur tes yeux comme une écharpe de feu.

Voila l'amour, l'homme de mes jours, le voila lui, l'homme de mes nuits.

Voile, voilée, voilage, bateau
Voilée, voile, voilage, femme
Voilage, voilée, voile, rideau

Christophe

Regarde le,
Prisonnier du vent
Et du souffle gazeux,
Son vol aérien

Observe le,
Filtre de lumière
Des silhouettes se cachent
Et des yeux qui regardent

Apercois le
Quand il s’ouvre impudique,
Expose et découvre
Le corps et ses défauts

Gilles
VOIS LE
C
argue-le, hisse-le, haut,
Pas sur ton doux visage,
Mais sur ce poteau de torture qui malgré l’âge,
Porte encore beau.

Cargue-le, hisse-le, haut,
Sur ce poteau de haine
Qui n’en a envoyé que trop
Voir si là-bas l’herbe
De Jésus, Jehovah ou Mahomet
Etait plus verte.

Cargue-le, hisse-le, haut,
Sur ce mât qui t’a envoyé
De la nuit des temps
Le message de liberté.

Cargue-le, hisse-le, haut,
Jusqu’à ce que le vent vienne à gifler
Le père, la mère, le frère
Qui te l’ont imposé

Cargue-le, hisse-le haut,
Jusqu’à ce que le vent le déchire
Et fasse enfin éclater ta beauté libre
Et celle de tes sœurs du Tibre

Cargue-le, hisse-le, haut,
Qu’un lendemain de vagues,
Vers une nouvelle île vous entraîne,
Où vous pourrez briser vos chaînes.

Cargue-le, hisse-le, haut,…
Mais quoi, tu ne veux pas ?
Tu le mets en berne ?
Sur tes cheveux tu le veux toujours autant ?
Rentre à la maison, alors,…
La vaisselle t’attend !

Clara
Matin de hâte
Robes et voiles de nonnes frôlent le pavé et s’envolent les moineaux affolés.

Nuit d’orage
Livide fantôme d’une voile sur la vague blême bientôt avalée par la nuit

Samedi minuit
Dans le tronc cruel d’un platane s’est pliée la tôle d’une voiture.
A la pointe de l’antenne, faseille un lambeau de voile de tulle.

Tablée d’été
Sous les tilleuls, heure des bulles au seuil de la sieste.
A langues déliées se lève le voile sur des secrets enfouis.

La porte claque
On se dévisage stupéfaits ; elle a mis les voiles. Et voilà !

Stupeur dans la classe
Stupide question de voile. Aïcha ne viendra plus. Son frère l’a dit.
Hélène
La voile qui faseille n’est pas toujours signe de grand calme
Avec qui prendre le large en toute confiance ?

Qui dévoila la première plaque à la mémoire de la mère du Christ ?
Et celle pour la mère du soldat inconnu ?
Je veux des noms !

Tu as baissé les yeux en réponse à mon regard, que dois-je comprendre de tes pensées voilées ?

Vois-le, il t’appelle et tu fuis.
A quoi bon être père ?

Qui repasse chaque jour ces tenues immaculées : l’homme se promène de blanc vêtu et la femme porte le voile ?

Lorsque je te vois, je mets les voiles,
Tu me gonfles, même de loin,
Et je m’envole pour mieux te fuir.

Pied léger, regard lubrique, voile pudique,
Des clichés bien excitants !
Marijo
La veuve l'a joyeusement cédé à la jeune fille exilée qu'elle assortit à son string. L'un s'en réjouit, l'autre s'est sagement fait enfermer. La none encellulée s'y cramponne contre vents et marées. Impatient d'appareiller le marin les hisse bien avant de les mettre.

Atelier du 06 octobre 2006 - Dernier atelier rue de Citeaux

A partir du modèle suivant écrire le synopsis d'un court court métrage dont les contraintes sont :
Minimum 2 personnages maximum 3
Lieu : Paris en extérieur ou dans un café
Temps : De jour
Epoque : Contemporaine
Type : Comédie, ou comédie dramatique.
Exemple de synopsis du film les mauvais joueuers :" Paris, le quartier du sentier. Noël approche et la vie de Vahé part à vau-l'eau. La boutique de son père, avec qui il travaille, va bientôt fermer. Trop de dettes et d'impayés. Lu Ann, la femme qu'il aime, le quitte et il sent bien que les arnaques au bonneteau qu'il pratique avec Shak et son frère Toros, ne vont pas le mener bien loin. Yuen le frère de Lu Ann, arrivé clandestinement en France, refuse de travailler pour le réseau qui l'a fait passer, sans se rendre compte du danger qui le guette. Se prenant d'affection pour lui Vahé décide de l'aider. Peu à peu se tisse entre eux un lien d'amitié qui met à l'épreuve la loyauté de Vahé envers ses vieux amis. Si la vie semble reprendre son cours, quelquie chose s'est brisé en Vahé. Quelque chose qu'il ne contrôle pas. Quelque chose d'irréparable..."


Thierry
Paris, les quais de Seine. Un homme avec un bouquet de fleurs à la main, à une discussion animée avec une femme. Ils marchent de long en large. Des gestes accompagnent la discussion. On voit le bouquet de fleurs virevolter de gauche à droite et de bas en haut. L'homme semble en colère. La femme est triste voir éffondrée. L'homme lui tend un mouchoir en papier, puis il l'a prend dans ses bras. Un jeune homme accoste le couple en les embrassant. A nouveau le bouquet qui fait des arabesques. L'homme écoute le jeune homme parler. Le bouquet est maintenant le long des jambes de l'homme. Le bouquet tombe. Le jeune homme quitte le couple.
Gilles
Paris, tôt le matin. A l’heure où un jour blême, lentement, rabat la couverture sur la nuit. Une pluie fine fait briller les rails, entre les herbes, sur la vieille ligne de petite ceinture. Après avoir dévalé le talus, Patrick et Alain cheminent le long de la voie. Ils s’engueulent. Alain ne comprend pas pourquoi Patrick l’a entraîné là, dans le froid, l’humidité, la saleté, les tags sur les murs, les trous d’eau le long de la voie.
Patrick ne l’écoute pas et continue son chemin, dans l’obscurité pâle, l’air buté. On entend tout près, les premiers camions qui déchargent leurs marchandises, là-haut dans la rue, près du pont qui enjambe la voie ferrée.
Ces bruits familiers rassurent un peu Alain que le silence des voies, les motivations hasardeuses de Patrick inquiètent.
Au loin un halot de lumière s’allume faiblement, au travers du rideau de pluie. Fascinés par cette lumière qui vacille dans la nuit, Alain et Patrick s’en approche. C’est une gare. Le quai est mangé par les herbes folles. Une ombre se dessine, bouge, agitant son fanal.
L’ombre porte une casquette des chemins de fer. Alain et Patrick hésitent à poursuivre, mais déjà l’ombre est allé au devant d’eux.
« Trop tard », dit l’ombre d’une voix sombre.
« Comment ça, trop tard ? », s’inquiète Alain, repris par la peur.
« Ben oui, vous l’avez manqué, d’un poil »
« Qu’est-ce qu’on a raté ? »
« Ben…le train…il est passé il y a 150 ans », répond l’ombre.
« Et le prochain, il est à quelle heure ? », questionne Patrick.
« La demie de l’éternité », répond le chef de gare, qui tourne aussitôt les talons, et regagne son bureau.

Hélène
Lui (brun, la trentaine, médecin à l’hôpital de Nanterre) est à l’intérieur du musée Albert Khan (métro Rhin Danube) pour voir l’exposition Maghreb ; il la voit arriver . Elle,( la trentaine, cadre dans une entreprise de pétrochimie)blonde, tailleur pantalon, hésite à contre-jour devant le guichet (entrée gratuite pour le premier dimanche du mois) puis fermement s’installe devant chaque notice de chaque photo, prend des notes, revient en arrière sur certaines …Il repère que c’est sur des photos d’Algérie, le pays de sa famille , où il se rend chaque été.
Il lui chuchote à l’oreille un changement entre la photo de 1860 et la réalité de 2006, qui la fait rire. Elle se retourne et le dévisage dans la pénombre, lui trouve fière allure, et avoue son ignorance, mais son intérêt puisque sa famille y a vécu plusieurs générations, au hasard des garnisons.
Ils poursuivent ensemble la visite, mais ne peuvent gagner les jardins du musée car il pleut trop fort. Ils décident d’aller au cinéma voisin voir Indigènes.

Clara
Une brasserie à Paris. femme d’un âge certain est attablée en face d’un jeune homme au visage tendu. Un serveur approche le sourcil en attente. « J’hésite entre un Don Pérignon et une menthe à l’eau » dit la femme avant de trancher pour un thé. Le jeune homme ne peut s’empêcher de sourire, il opte pour un Perrier citron. La femme sort de son sac une enveloppe de papier kraft qu’elle pose sur la table. Le silence entre eux n’est brisé que par les commandes passées au-dessus de leur tête et le battement de la porte tambour, les conversations environnantes sont étouffées par les tentures. La femme tripote le coin de l’enveloppe, elle se racle la gorge, soulève sa tasse et la repose sans en avoir bu une goutte.
« il est temps, je crois que je t’en dise un plus sur cet homme qui t’a donné ton nom, c’est le nom que tu vas bientôt donner à Caroline. Tu ne seras pas étonné de ne pas trouver dans ces papiers ni photo de lui ni arbre généalogique, tu Tu en aurais vu dans notre appartement, à côté de celles de mes parents . Non, tu ne trouveras rien de tout cela mais de tristes reçus. Je n’ai jamais aimé l’homme auquel j’ai acheté notre nom. Je n’ai jamais partagé sa vie, je n’ai fait que redouter mois après mois son passage (souvent le matin quand tu étais parti à l’école) et lui remettre ce qu’il attendait pour garder le silence. Je t’ai souvent dit que tu étais un enfant de l’amour, je ne suis pas en train de te dire le contraire aujourd’hui, Eric. J’ai follement et silencieusement aimé ton père ».

mardi, septembre 26, 2006

Atelier du 22 septembre 2006

Proposition à partir d'un texte de Frédéric Boudet. Dans son recueil de nouvelles intitulés Invisibles figure une nouvelle intitulée Calligraphie. Elle commence ainsi : "Mon père est mort hier. J'ai loué une voiture et j'ai pris l'autoroute pour rejoindre la côte atlantique. Juste avant d'atteindre Saint-Nazaire, j'ai fait halte sur l'aire d'autoroute où j'avais gagné mon premier salaire lorsque j'étais encore au lycée...."
La proposition consiste à faire avancer un texte en ne s'arrêtant pas sur les sentiments ou émotions mais en privilégiant la succession des actions.
Christophe
J’ai balancé le pavé dans le carreau de la voiture. Un milliard d’éclats de verre sur le goudron. Quelques uns sur le siège du conducteur. Les passants passaient parce que c’était jour de marché. Moktar a passé le bras par l’ouverture et ouvert la porte. Il s’est engouffré pour rafler ce qui traînait à l’avant. Une gauloise qui garait sa voiture a eut l’air ahurie. Francis s’est occupé de l’arrière. J’ai tiré deux ou trois taffes en matant alentour. Ils sont sortis avec un CD de la StarAc et une pochette en plastique. On voyait pas ce qu’il y avait dedans. Moktar a dit que c’était pour sa petite sœur. La gauloise est partie chercher une place ailleurs. J’ai dit que c’était naze et j’ai envoyé un glaviot sur le pare brise. On est parti au marché. Y avait des fripes et des boubous au début, des cuvettes et de la brocante juste après. Un malien nous a proposé des bracelets en cuir et des bonnets rasta. Il puaient la transpiration, alors je me suis pas arrêté. Il a dit qu’il avait aussi des téléphones portables. Comme on s’arrêtait pas, il a dit qu’il en avait un tout frais de ce matin, sans le chargeur mais avec la puce garantie activée. Sans arrêter de marché, Francis lui a montré qu’il en avait un dans chaque poche. Alors le mec a fait tout bas qu’il avait aussi des trucs plus planant à deux rues d’ici. Moktar a dit que son frère travaillait au hallal qu’on voyait là-bas, et qu’il voulait pas d’embrouille dans le quartier. L’afrique nous lâchait pas. Il a assuré qu’y aurait pas d’embrouille, et qu’il avait mêmes des pharmacies bleues pas chères qui feraient déchirer nos copines. Francis et moi on s’est quand même arrêté.
Gilles
Mon père est mort, d’un suicide. En voiture. Il a fallu que j’aille récupérer la voiture. « La tête de delco est morte », a dit le garagiste d’un air blasé. « C’est un moindre mal », ai-je répliqué.
« Morte la bête, mort le venin », ai-je pensé, en m’asseyant au volant, après qu’il ait une réparation d’infortune.
Durant tout le trajet, me revenait le regard du garagiste, ses mains de noir défunt, son haleine qui puait l’eau-de-vie. Des hauts le cœur m’envahissaient.
J’avais besoin de boire, d’étriper mes tripes.
Au fait, ça sert à quoi, les tripes ? Elles se rappellent à vous que pour vous faire mal. Comme s’il n’y avait pas assez de mal comme ça dans la vie : la misère, les impôts, Sarko, Ségo, et le voisin qui ronfle et réveille tout l’immeuble.
« Faux ! », me dis-je brusquement, « la joie fait aussi sortir les tripes : un bon vin, les jambes d’une femme, le rire d’un enfant sur les chevaux de bois, la connivence d’un ami. Tout ça met les tripes sans dessus-dessous : la tripe se marre, la tripe jubile, la tripe se gondole, s’épanouit, s’esclaffe, se régénère au contact du bonheur des autres. Et, comme elles sont plusieurs, les tripes, vous imaginez la java…
‘Jamais dansé la java, moi… Aujourd’hui j’aimerais bien…
Clara
Pierre a disparu. Pierre a disparu et je suis en route vers le commissariat de police. Une réunion de profs, les portes qui s’ouvrent avec un temps d’avance et voilà Pierre sur le trottoir regardant s’éloigner les copains par grappes. Laurent m’appelle, il est embêté : quand il est arrivé à 17h, la rue était déserte devant le collège. C’est le gardien qui lui a dit que les cinquièmes étaient sortis plus tôt que d’habitude. Il avait bien vu un gamin rester assis sur le muret avant de se diriger vers le stade. Je fais un détour par le stade ; pas de match, pas de Pierre. Ça l’a pris petit, cette habitude de fuguer. La première fois, il devait avoir quatre ou cinq ans. Il avait rempli un carton à chapeaux de chaussures et de biscuits et était parti, droit devant lui halant son fardeau qui lui battait les mollets. On l’avait retrouvé trois heures plus tard, assis sur un banc, la tête ensommeillée posée sur le carton qu’il tenait serré contre lui. Entre deux sanglots, il avait expliqué aux agents qu’il était en chemin vers l’Amérique du Sud et qu’il s’était perdu. Je passe devant l’agence de voyage, un avion décolle sur le bleu du papier glacé. Au fil des années, les destinations s’étaient éloignées, les scénarios s’étaient affinés. C’est ainsi qu’un jour de rentrée scolaire, c’est son polochon, habilement glissé sous la couverture que j’ai dû secouer. Cette fois là, il avait eu le temps d’arriver à la gare et de sauter dans premier train venu. Ce n’est que le lendemain qu’il nous fut ramené. Ses explications devenaient de plus en plus saugrenues avec le temps. Progressivement, la garde s’est rapprochée, mais peut-on empêcher un gamin de partir, d’inquiéter, de se faire attendre.
Marijo
J'ai enfin trouvé un boulot. Un boulot un vrai. Vous commencez demain à neuf heures.
Sous la douche mes pensées se bousculent, ricochent. Excitation fébrile d'une rentrée annoncée. Odeur des livres neufs aux couvertures glacées. Plaisir des crayons affûtés, du stylo plume et des nouveaux cahiers aux pages immaculées. Ce matin j'arriverai à l'heure, même en avance. Ce sera la seule fois. Mon bureau et en bois, près du radiateur, comme à l'école, Depuis ma place je vois la rue. J'en ai toujours rêvé. Le tableau sur le mur du fond rappelle qu'ici le savoir est transmis. Le verbe «être» et «avoir» au présent. La leçon d'hier.
"Je vous laisse, vous trouverez la liste des apprenants et des bénévoles dans les classeurs. Si vous avez besoin de quelque chose, n'hésitez pas"
Me voilà partie pour prendre la place de ceux et celles que j'ai toujours détestés durant toute ma scolarité. D'une certaine manière je suis devenue "principale".

dimanche, septembre 10, 2006

Atelier du 8 septembre 06

Proposition : Définir ce qu'est l'atelier d'écriture
D'après le livre de Bernard Werber : "Encyclopédie du savoir relatif et absolu"
Christophe
C’est l’histoire d’une rencontre improbable. Deux êtres qui se sont croisés un jour de la vie.
Lui musculeux et volontaire, dégage des relents de sueur et d’effort. Il est sonore et exubérant, gueule plus qu’il ne parle, s’esclaffe, explose. Il chaloupe, chavire, affiche volontiers une tenue désordonnée. Il s'active un peu crâne mais se plie sans discuter au cérémonial convenu.
Elle gracile et délicate, sensible et délicieuse, exhale des senteurs raffinées. Elle est patiente et silencieuse, cherche sa proie et se tapit. Souvent un peu perfide, parfois étrangère à elle-même, elle ménage les sensibilités, s’attendrit et réfléchit. Puis elle bondit et se love.
Lui c’est l’atelier. Elle c’est l’écriture. Ils s’intéressent peu au souvenir de leur rencontre. Ils ne réfléchissent pas non plus au temps qu’il leur reste. Ils préfèrent jouir sans se soucier.
Thierry
Quand je dis atelier d'écriture, n'allez pas imaginer une vaste imprimerie où de vieux ouvriers crasseux remuent des casiers en bois remplis de lettres en plomb. N'allez pas imaginer non plus, une réunion de critiques littéraires comfortablement installés dans des bridges de velour rouge. Non notre atelier tient plutôt de la séance "intello-alcoolo-bobo" que d'un travail académique!. Le principe est basé sur l'amitié et l'amour de l'écriture et nous réunit tous les quinze jours au milieu de Sauvignon du 14ème et de pâtisseries du 18ème. Et puis il y a la proposition d'écriture inventée par l'un d'entre nous, qui s'appuie sur un livre...un vrai.
Le but étant d'écrire, que l'on respecte ou non cette proposition, ce moment d'une heure oscille entre la hantise de la page blanche et l'instant érotico-séraphique- sécurisant instantané. Puis vient le moment des retours, ou chacun à l'aide d'un papier proposant un thème, fait ses commentaires.
Je crois que c'est le seul instant ou la rigueur est demandée, sous peine de s'entendre dire "on s'en fout !".
Cet exercice nous enmène à chaque fois sur des chemins inexplorés, met nos sens en éveil et fait une remise à zéro de notre cerveau. Ici pas de jugement, mais de l'amitié, pas de convention mais de l'attention. Beaucoup de voyages imaginaires, dans le passé ou le futur, dans les méandres de l'amour ou de la révolte, pas de tabous mais de la pudeur, notre atelier est basé sur la tolérance, l'amitié, le Sauvignon, et un Soda du jour, une bien belle recette pour de simples voyelles et consonnes "a...lcoolisés !".
Clara
Atelier d’écriture, débiné par Renaud brocardant les bobos. Petite fabrique d’écriture du vendredi soir histoire de tricoter du texte entre copains. A peine sorti du boulot, se retrouver à l’atelier. Dingue ! Non ? Deux bonnes bouteilles plus tard, abandonner les soucis, déballonner les tracas et bedaine remplie, s’adonner au plaisir de l’écriture. On a lu, on lit. On a bu, on rit. L’un propose, tous disposent. Silence pour une heure, à peine troublé du hachoir des touches, de la mollette des briquets, du frôlement des pages. Dans les bobines se déballent les idées, se dérobent les mots, déboulent de petits bonheurs surprenants. Sur les cahiers et les écrans, crayons et claviers crépitent et s’emballent, sèchent et traînent. Soupirs lisses, fronts plissés et l’heure a tourné. Passent les petits papiers cent fois tripotés pour guider l’écoute et affûter les retours. Dans l’euphorie des bulles du jour, on lit et se délie, on est toute ouïe.
Marijo
Vendredi. La semain est finie. C'est l'écrit.
Rendez-vous des bobos de Cîteaux.
Peu importe le talent. On s'en fout!
Petit vin blanc qu'on boit entre complices. Fringales, gourmandises, rigolades, diversions, apartés.
Cinquante-cinq minutes de feuille blanche à noircir. Tempêtes cérébrales, incertitudes, trouilles, fébrilité, divagations, égarements. Délires des mots. Mêlées de lettres. Conversations de l'esprit. On se dit, se dévoile, se découvre.
Cinq minutes. Stylos posés, claviers lâchés, ronronnement d'imprimante.
Un soda.
Lecture. Sourire, surprises, troubles, émotions, cadeaux, grâce.
Relecture.
A nous les retours. Impression, cohérence, champs lexicale, travail en extension, observations diverses, rigolades, diversions et apartés.
Minuit. La lourde porte se referme. Fatigués mais contents. Demain c'est grâce mat!

samedi, juillet 22, 2006

Atelier du 21 juillet 2006


"Rooms by the sea" Edward Hopper
Claude Esteban "Soleil dans uen pièce vde"
"Le peintre s'appelle Edward Hopper. Il a représenté des rues désertes, des femmes dans une chambre d'hôtel, des bureaux, des gares où pas un train ne passe. L'homme qui regarde comprend qu'il ne pourra jamais habiter chacune de ces images, qu'elles sont là et qu'elles lui échappent. Il décide donc de vivre à côté d'elles avec des mots, des mots qui, peu à peu, se, transforment en une histoire, celle du peinre peut être, la sienne aussi...
Suite de 47 petits textes inspirés chacun d'une toile de E.Hopper
A nous de dire le toile "Rooms by the sea"

Thierry
Ma première image en me réveillant fut cette porte d'entrée ouverte sur un océan de vide. La lumière innondait l'entrée et la pièce principale. Je me souviens aussi de la couleur des sols; vert caca d'oie dans l'entrée, vert gazon dans la salle à manger. Mais pourquoi du vert ? Je n'aime pas le vert dans une maison.
Je ne me souvenais pas d'avoir ouvert la porte. Mais qui alors ?. J'étais seul dans l'entrée face à cet océan couleur des mers du sud. Au fur et à mesure de mon réveil, j'essayais de construire le puzzle de ce rêve, mais tout semblait confus. Pourquoi tant de vert? pourquoi cette porte ouverte sur l'océan? Pourquoi cette lumière ? Pourquoi aucune ligne arrondie?
J'essayais de trouver du rationnel pour quelquechose qui ne l'était peut être pas, à part....
Tout cela était peut être là, pour me rappeler que la veille j'avais donné mon congé à mon employeur, vendu mon appartement, quitté ma famille, mes amis, mon pays, pour venir vivre ici sur cette île.
En quelque sorte comme une porte ouverte sur l'amour de la vie et de la nature et de mon Dieu à moi.

Brigitte
Par la fenêtre paysage. On peut voir le ciel bleu rose qui marque une frontière avec la mer d’un bleu dur, sans ressac comme un espace vide. La lumière crue souligne le vide de la première pièce et ses couleurs froides. A moitié cachée de notre regard, une deuxième pièce avec ses meubles cossus où l’on peut imaginer une présence humaine.

Christophe
Par la porte grande ouverte, le bleu sans fin de l’océan. Il est là. Immédiat. Calme et sûr de lui. Jusqu’à la courbure imperceptible de l’horizon. Il y a la maison à l’intérieur de laquelle le peintre nous installe avec lui, et les flots tout autour. Pas de jardin et pas de plage. Aucune transition de l’un à l’autre. La porte ouverte du vestibule surplombe les profondeurs. Un pas de trop et c’est la chute. Descente inexorable dans l’abîme. L’abysse qui engloutit. Le bleu qui vire au noir. La température

Marijo
Soleil dans une pièce vide Vue sur la mer au petit matin. Lumière blanche, ciel bleu, petit clapot, la brume se lève, il fait beau. Pas de superflu dans le vestibule baigné de soleil, la pièce est vide. Le soleil en serait-il le seul occupant? On sent à la patine des murs que le domicile est habité ou l'a été. L'œil est accroché par le détail de la serrure. De quelle visite indésirable doit-on se protéger? Un sol vert cru comme les herbages de la terre ferme. Les murs blancs renvoient une lumière saturée. Il fait chaud. On se sent bien. Ni porte manteau. Ni paillasson. C'est sans vêtement et sans chaussure qu'on passe la porte. Le confort n'est pas gommé. Dans la pièce voisine, un divan de velours rouge appelle. L'espace ne se suffit pas à nourrir les pensées, il a fallu l'agrémenter d'une toile que le soleil inonde et dont on ne connaît pas la teneur. Peu importe. Est-ce une maison mal arrimée, partie au grès des vagues ? Une grande marée? Les déménageurs sont-ils en bateau à quelques ondes de la porte? A moins que ce ne soit le domicile d'un gardien de phare amoureux d'une sirène? Un rêve. Une utopie.